Un mois à peine après l’entrée en vigueur du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD en français, GDPR en anglais), voilà qu’arrive une première action concernant la collecte de données biométriques, en l’occurrence vocales1. Cela me réjouit vu ma position sur la biométrie, bien que je pense que cela n’aboutira à pas grand-chose.
Le contexte
Le service des impôts du Royaume-Uni (Majesty’s Revenue and Customs ou HMRC) s’est mis en tête d’utiliser la biométrie vocale (donc de type intermédiaire) pour authentifier les personnes appelant leurs services. Fluidifier le parcours utilisateur est souvent une très bonne idée, et la biométrie de ce point de vue y concourt assez bien.
Sauf que
Si le confort d’utilisation est au rendez-vous, les questions quant à l’utilisation de la biométrie sont légitimes. Il me semble reconnaître la solution dont il est question (il s’agit de la solution développée par Nuance23, que j’ai pu tester il y a quelques années pour mon employeur, avec leur célèbre sésame « ma voix est mon mot de passe ») et si Nuance respecte de bonnes pratiques en la matière, cela ne dédouane pas le responsable du traitement (le HMRC) de respecter les droits énoncés par le RGPD, notamment :
- Le droit à l’effacement des données
- L’obligation de recueillir de façon simple le consentement des utilisateurs pour l’usage de leurs données personnelles.
Les éléments biométriques font bien sûr partie des données personnelles, et il semble que le HMRC pousse un peu trop ses utilisateurs à utiliser la biométrie vocale, et que l’opacité entoure à la fois l’usage précis des données (qu’est-ce qui est utilisé, qu’est-ce qui est conservé et comment) et la possibilité de faire supprimer ses données.
Pourquoi ça n’aboutira pas
Parce que je vois mal le HMRC ne pas se mettre en conformité, même à contre-cœur. Il suffirait d’améliorer le processus de collecte, et de mieux gérer la suppression, en indiquant clairement comment procéder.
Pourquoi c’est important quand même
Cela prouve que ce n’est pas parce que ça plaît à plein de monde que la solution est bonne, ou qu’elle ne soulève pas d’inquiétudes chez d’autres personnes. Par exemple, comment savoir si des échantillons vocaux n’ont pas été conservés, ou pire transmis à d’autres entités ? Même s’il est peu probable que ça soit le cas, cette affaire montre que des citoyens sont inquiets sur l’usage de ces données.
La biométrie vocale demande de recueillir (au moins temporairement) des échantillons, pour former un modèle ou plus précisément un gabarit (au sens biométrique) caractérisant l’utilisateur, un peu comme un hash.
En France, recueillir une base biométrique centralisée, même si elle n’est constituée que de gabarits (et non d’échantillons) exige l’accord de la CNIL. On ne fait donc pas n’importe quoi avec ce type de données.